Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article CORINTHIUM AES

CORINTHIUM AES. Parmi les villes que la fabrication du bronze avait rendues célèbres, Corinthe tenait le premier rang dans l'antiquité. Mais nous ne connaissons que par ouï-dire ce fameux airain de Corinthe dont l'invention faisait le sujet de récits légendaires, et nous ne pouvons le reconnaître dans aucun monument précis. Les analyses qu'on a faites des bronzes antiques ont toujours révélé des alliages où l'étain, le plomb, le zinc entrent en composition avec le cuivre [Ans]. Mais on n'y découvre pas les métaux précieux, l'or et l'argent, qui, au dire des anciens, étaient la base essentielle de cette fonte et lui donnaient des qualités particulières de résistance et de coloris. On connaît la légende qui attribue l'invention de ce métal à un hasard merveilleux : pendant l'incendie de la ville, prise par le consul Mummius en 608 de R. (146 av. J.-C.), les objets de bronze, d'argent et d'or y furent consumés en si grand nombre que des ruisseaux de métal en fusion coulèrent dans les rues et formèrent en se mêlant une composition nouvelle, dont l'éclat fut remarqué et qu'on reproduisit dès lors artificiellement Plutarque se fait l'écho de deux versions un peu différentes : suivant les uns, ce serait l'incendie d'une seule maison de Corinthe, contenant un peu d'or et d'argent et une grande quantité de cuivre, qui aurait donné lieu à la découverte ; suivant d'autres, un fabricant d'objets en bronze, ayant trouvé par hasard une cachette remplie d'or et voulant dissimuler sa trouvaille, aurait mêlé cet or à petites doses dans sa fonte de cuivre qu'il vendit fort cher à cause de sa beauté et de son éclat inusité'. Plutarque s'empresse d'ailleurs d'ajouter qu'il ne croit ni à l'une ni à l'autre de ces histoires. Tous ces témoignages concordent à nous montrer que les anciens attribuaient les qualités de ce métal à un alliage d'or et d'argent, bien que certains savants modernes supposent qu'il contenait simplement une certaine quantité de calamine ou de sulfure de zinc, qui aurait donné au métal une couleur dorée ou cuivrée 3. Pausanias, d'après ouï-dire, l'attribue simplement à une trempe de métal dans les eaux de la fontaine Peiréné Pline distingue trois espèces d'airain de Corinthe, suivant la quantité plus ou moins grande de métal précieux qui y entrait : il était blanc et se rapprochait de la couleur de l'argent, quand ce métal formait la base principale ; jaune, quand l'or y dominait ; enfin, dans le troisième genre, l'or, l'argent et le bronze étaient en proportions égales Au premier genre se rattache sans doute le cratère argyrocorinthien que mentionne une inscription romaine L'airain paraît au contraire dominer dans une des portes du temple de Jérusalem, reconstruit par Hérode COR 1508 . COR le Grand, d'après le témoignage de l'historien Josèphe'. Les bronzes de Corinthe acquirent bientôt une célébrité universelle. Dans la pompe de Ptolémée Il Philadelphe décrite par Athénée 8, on promena d'énormes vases en airain de Corinthe, ornés de reliefs artistement ciselés, ayant une capacité de plus de 300 litres. A Rome, dès la fin de la République, les amateurs se les disputaient à prix d'or ; Pline prétend que si Antoine se décida à bannir Verrès, attaqué par Cicéron, c'est qu'il n'avait pu obtenir de l'accusé qu'il lui abandonnât ses bronzes de Corinthe 9. L'orateur y fait, en effet, de fréquentes allusions, dans ses Verrines 16 sous le nom de corinthia rasa; il nomme aussi d'autres objets du même métal, comme des cuirasses, des casques, et en général tout ce qu'on appelait SUPELLEx a1 Nous venons de voir qu'on l'appliquait même en architecture à l'ornementation des édifices. Parmi les offrandes déposées dans un temple d'Apollon, à Regium, on trouve mentionné un bassin en bronze de Corinthe i2. On faisait avec le même métal des statues ou des statuettes ; au temps de Trajan, on voit une image de l'empereur faite en bronze de Corinthe et consacrée dans un sanctuaire 1s Maïs c'est surtout la fabrication des vases qui était importante; même, d'après Pline, les vases seuls pouvaient titre en véritable airain de Corinthe, et non pas toutes les oeuvres d'art qu'on débitait à Rome sous ce nom 14 Les ouvriers, adonnés à ce genre d'industrie, portaient le nom spécial de corinthiarii, ce qui explique l'épigramme dirigée contre l'empereur Auguste, qu'on accusait d'être très friand de ces vases et d'avoir fait porter sur les listes de proscriptions plusieurs personnes qui en possédaient ; on écrivit sur sa statue : « Pater ange?? tarins, ego corinthiarius 15. » Au temps de Tibère, les vases de Corinthe atteignaient des prix énormes, grâce à cet engouement général 16. La maison impériale fit tant d'acquisitions en ce genre qu'on dut créer un emploi spécial pour l'achat et l'entretien de cette vaisselle précieuse : ce sont les e eorinthiis, appelés aussi corinthiarii, qu'on trouve plusieurs fois mentionnés dans les inscriptions 17 ; le genre des fonctions est bien précisé par un vase en forme de canthare qui est sculpté entre deux palmes sur une de ces pierres u. Ces serviteurs de la maison impériale sont placés sur le Ajoutons qu'on trouve aussi le mot faber a corinthiis t`e mais il est douteux qu'il désigne un serviteur de l'empereur ; il s'agit plutôt d'un artisan, dont l'industrie spéciale est ici précisée par une inscription funéraire. E. Pontes. CORI1UM. --Lorsque la peau, dépouillée de son poil, sortait de l'atelier du tanneur à l'état de cuir (èi Ua' , cxuTOC, [3épcra, curium, scortum 9; pour Ies fourrures y. pl:uns), elle était livrée aux ouvriers qui devaien la fat on'ser. Les Grecs comprenaient sous le nom général de axs'ra't oit cxuroiôp.ot [co0IARlas] tous ceux qui vivaient de cette industrie 3. Dans Homère, il est vrai qu'Eumée se taille lui-même des sandales en peau de boeuf 4; mais il y a déjà des hommes qui s'occupent spécialement de ce genre de travaux ; tel est Tychios, habile artisan d'Ilylè en Beotïe (exu^co'côg'eav cépaio5) ; c'est lui qui a fabriqué le bouclier d'Ajax avec sept peaux de boeuf cousues ensemble n et qui. passe pour l'inventeur de la cordonnerie °. Tel est encore Polybos, qui a fait pour deux jeunes Phéaciens un ballon teint en rouge''. Plus tard lorsque, grâce aux progrès de la civilisation, l'industrie du euhse fut développée, elle donna naissance à plusieurs métiers qui, en Greco et ensuite ia Rome, allèrent toujours se multipliant. Nous citerons : 1° les cordonniers qui se partageaient eux-mêmes en plusieurs catégories [sa'roR] ; 2° les selliers et bourreliers (i,taàtvoaotéç, capistrarius 9, V. nom-mus) ; 3° les fabricants d'objets en cuir ou garnis de cuir à l'usage des armées, tentes [TARERNACULAntUSJ, cuirasses (ôoapaxoaotig, V. nom-tanins), boucliers («l'7 ièo',~Lrdç, v. cLIPEUs) etc.,. ; 44° les fabricants de parchemins (~oEportotoi, membranarii, v. MEmBruxs); 6° les fabricants d'outres [uTafcGLARIUS[, de flacons de voyage en cuir [AMPULLA et AMPCLLARIUB]; 6° les fabricants d'objets de luxe en maroquin [pARTRiCARiLS]; 7° les laye tiers emballeurs, qui couvraient de cuir les coffres en bois [TRALioPOier]; 5° les artisans qui faisaient de la colle-forte avec des rognures de vieux cuir [et,UTrsARtus], etc. Les Grecs et les Romains se servaient à peu près des mêmes cuirs que nous. Homère nomme seulement le boeuf et la chèvre 9 ; mais après lui il en entra dans le commerce un bien plus grand nombre d'espèces. Deux documents nous font connaître quels étaient ceux que l'on employait sous les empereurs romains, comment on les classait et quels en étaient les prix. Dans une inscription datée du principat de Septime Sévère et de l'année 202, qui fixe les droits de douane à percevoir dans une ville de la frontière, Zarai (Numidie) 10, les cuirs sont l'objet d'un article spécial (tex eoriaria). Le cuir tanné (curium perfeefunr) est soumis à une taxe différente de celle qui frappe le cuir p;losum; ce mot désigne ici saris chute peau non seulement couverte de poils, mais brute, non apprêtée. Pour ira peaux de cheval et de chèvre, on ne paye pas la meure somme que pour le cuir souple (atm-discuta rnalacunà) 11, évidemment parce que celui-ci a une valeur intrinsèque plus élevée. Dans le même article sont rom-. prises la colle, comme étant faite avec du cuir, et, ce quis est plus curieux, les éponges, sans doute parce qu'elles peuvent être assimilées à des dépouilles anirnales "u. COR -1509 __ COR Dans l'édit de Dioclétien sur les tarifs (an 301) u il , a aussi un article consacré aux cuirs; plusieurs comprennent deux qualités (prima, secundo, forma), En première ligne figurent les cuirs de luxe, les maroquins (pellis Dablflonica, Tralliana, Phoenicea, Lacchena). Viennent ensuite les cuirs communs, faits avec des peaux de mouton, de chèvre et de chevreau; ils coûtent plus ou moins cher, suivant qu'ils ont été déjà tannés ou non (copiant conferhm, e. in/edam). On établit une distinction de plus dans le tarif auquel sont soumis les cuirs de boeuf, selon qu'ils sont destinés à la cordonnerie (ad soleanda calciarnenta) ou à. la sellerie (ad loramenta et caetera) 14, G. LAFAYis. CORNICEN [couau].